Patty Jenkins dévoile “Monster” en 2003. Récompensé par un Oscar et nominé dans une vingtaine de festivals, le film préfigure les révolutions féministes qui auront lieu près de deux décennies après sa sortie. Le film relate l’histoire vraie d’Aileen Wuornos, prostituée de Daytona Beach qui deviendra une “tueuse en série”. Le long métrage raconte sa longue métamorphose en monstre ! Mais dans ce cas précis, qui est vraiment coupable ?
Monster : la genèse du monstre ?
Comment donner un visage humain à une tueuse en série ? C’était le défi que s’est donné Patty Jenkins. Avant de sombrer, Aileen Wuornos est maltraitée par ses “clients”, par la société qu’elle essaie désespérément d’intégrer, et même par son grand amour. En effet, après avoir rencontré ce dernier, surtout après avoir été très durement malmenée par un client qu’elle a fini par tuer en “légitime défense”, Aileen tente de réintégrer la société. Mais en tant qu’ancienne prostituée, les portes se referment automatiquement devant elle. C’est finalement son grand amour qui lui demande de se prostituer pour subvenir à leurs besoins.
Alors, désespérée, elle reprend le chemin des boulevards, mais cette fois-ci, elle n’en peut plus. S’ensuit une longue odyssée criminelle. Cette histoire est tirée d’une histoire vraie. Lorsque Aileen Wuornos est arrêtée, elle plaide la légitime défense. Sa défense ne sera pas retenue. Elle est exécutée en 2002.
Monster : Qui est le monstre ?
Aujourd’hui même, en 2024, Patty Jenkins aura subi le même sort. Mais dans ce genre de cas particulier, on est amené à se demander “Qui est le monstre ?”. Car le film débute sur l’enfance de la tueuse interprétée par Charlize Theron, et dès son adolescence, le malheur la prédestine à la prostitution. Chaque fois qu’elle tente de sortir de ce cercle vicieux, elle y retourne. Sa concubine compte aussi sur ses passes pour vivre.
Lorsqu’elle s’explique avec sa concubine Selby, interprétée par la grande Christina Ricci, au sujet de ses meurtres, elle s’exclame : “Mais qui sont ces gens ?”. Elle cherche dès le départ à justifier ses assassinats par le viol qu’elle subit en tant que prostituée. Ce viol qu’on lui inflige en tant que prostituée justifie-t-il qu’elle se défende par le meurtre ? À cette question, les tribunaux ont toujours apporté une réponse négative. Mais le sort qui prédestinait Aileen Wuornos à cette vie de prostituée puis de tueuse en série, tout comme cette sentence qui l’a amenée à la mort en 2002, nous renvoie au fondement de nos sociétés qui, bien que respectueuses des droits, peuvent être injustes. Aileen Wuornos trouve un visage humain dans le film de Patty Jenkins un an après avoir été exécutée.
