Home STAY IN CHRONIQUE Sauveur Eloheem : un rappeur parisien à contre-courant

Sauveur Eloheem : un rappeur parisien à contre-courant

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Sauveur Eloheem est un rappeur parisien qui a toujours préféré rester en marge du rap mainstream pour y développer son propre style, l’horrorcore. Devenu un artiste prolifique, il vient de dévoiler un EP intitulé Keanu Reeves, une véritable bombe de punchlines, imprégnée d’une bonne dose de mauvaise humeur. Avec la noirceur et l’honnêteté comme seuls chevaux de bataille, le rappeur offre un visage unique et singulier, en totale opposition à un rap français qui a perdu son unicité à force de flirter avec les tendances américaines. Il dévoile également un nouveau visuel, Cyanure, totalement inédit, tourné dans un manoir désaffecté.

Sauveur Eloheem : un rappeur parisien à contre-courant

L’EP est résolument old school au niveau des instrumentales, à une exception près. Si les trois premiers titres, Altesse, Colt et Mon Cœur, sont portés par une rythmique assez classique, embellie par une noirceur étouffante, le dernier morceau, Ici bas, repose sur un sample de hard rock, à la manière d’Eminem, conférant au final un aspect magistral et puissant. Comme le rappeur le laisse entendre dans Cyanure : « Sauveur Eloheem, ce n’est pas Isaiah » (Isaiah étant son vrai prénom), c’est un personnage qu’il a inventé. Entre punchlines corrosives et egotrip démesuré, comme dans « je prévois deux ou trois Durex pour un plan à trois avec des femelles extraterrestres », le rappeur façonne son personnage.

Si l’EP explore l’intériorité du personnage et ses angoisses, le clip est beaucoup plus axé sur l’egotrip. Dans Colt, l’artiste lâche quelques punchlines telles que : « Tu peux voir mon clip sur mon Pornhub car je baise tout ce qui bouge ». Le titre se termine sur « Putain de rime », une référence probable à « Putain quelle rime de bâtard » de Booba. Dans Mon Altesse ou Colt, l’artiste exprime son mal de vivre. Là encore, il adopte une démarche à contre-courant. Le rap actuel se perd souvent dans un déversement de bling et d’egotrip. En évoquant ses faiblesses sans renier les codes du rap, tels que la punchline et l’egotrip, et en posant sur des compositions ultra classiques, l’artiste avant-gardiste rend hommage à son genre tout en révolutionnant les codes. Sauveur Eloheem apparaît comme « Le Corbeau » d’Edgar Allan Poe (pour ceux qui l’ont compris), un homme tiraillé par la perte d’un être cher et emprisonné dans son fort intérieur. Dans Mon Cœur, le rappeur évoque cette situation assez clairement : « On n’a pas ciblé les cons » ou encore « Seule la souffrance est tangible, prisonnier sans écrous ». L’artiste, à l’instar d’Asocial Club avec 99%, est également très critique envers la scène rap actuelle.

Entre féminisme et misogynie rap, Sauveur Eloheem alterne ses phases. Dans le dernier morceau du projet, Ici bas, il parle encore de sa psyché : « La haine dans les veines, pas de haine avec les femmes, infâme avec le cri instable », ou encore dans Cyanure : « J’aime les femmes ».

Si l’EP est très subjectiviste, existentialiste littérairement, le clip est beaucoup plus classique, porté par une punchline constante. L’artiste a des références plutôt hétéroclites. Il peut citer Ramsès dans Mon Altesse et Barney des Simpsons dans Cyanure : « J’ai la tchatche, la classe de Barney Stinson, toi mon pote c’est plutôt Barney dans les Simpsons ».

Le clip a été tourné par Alex dans un manoir abandonné. Une belle image pour un rap en marge qui pose les bases d’un art plus honnête, tout en respectant les codes du rap français.

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