Home VIDEOTAPE 7ème Art (News Cinéma) John Wick Parabellum : 50 pour cent de chances de se tirer

John Wick Parabellum : 50 pour cent de chances de se tirer

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A la fin du deuxième volet de John Wick, Winston/ l’acteur Ian Mc Shane accorde une heure de répit à « Jonathan » après l’avoir excommunié. John Wick est devenu un encombrant pour avoir tué Santino D’Antonio /l’acteur Riccardo Scamarcio dans l’enceinte de l’hôtel Continental de New-York. Hôtel que Winston, « ami » et aîné de John Wick entraîne depuis quarante ans.

John Wick informe alors le puissant Winston (comme Winston Churchill) qu’il se montrera inflexible avec les éboueurs du sang qui tenteront de le retirer de la circulation. Tenus par un autre, ces propos seraient des échantillonnages de fanfaronnades. Mais Winston acquiesce car il voit en John Wick la réincarnation du personnage de Baba Yaga, figure de la mythologie slave. Et, talonné par son chien et les minutes, John Wick décide de se mettre à courir. Sa façon de se déplacer, plutôt raide et les pieds en dedans, avec ses cheveux noirs sales mi longs pourraient le faire un petit peu passer pour Forest Gump dans sa période marathonienne. Ou à certaines de ces femmes japonaises évoquées dans le livre Certaines n’avaient jamais vu la mer de Julie Otsuka.


Le voir poursuivi sans endroit apparent où se réfugier rappelle aussi cette fuite en avant du bagarreur Jet/l’acteur Nick Cheung dans le Election 1 & 2 (2005 et 2006) de Johnnie TO. John Wick est en effet un apatride plus désavantagé qu’un SDF. Mais étant attendu la sape portée et son C.V de combattant, certaines de ces impressions se délitent très vite.

Evidemment, à la fin du deuxième John Wick réalisé en 2017, John Wick se dépêchait pour arriver à temps au début de ce troisième volet tandis que son interprète, l’acteur Keanu Reeves, avec ce John Wick Parabellum continue de relancer sa carrière cinématographique pour la troisième fois après ses premiers succès dans les années 90 et après la trilogie Matrix. Matrix, des ex-frères Wachowski, est la trilogie -achevée en 2003- qui lui avait autant permis de redevenir un acteur qui compte qu’elle semblait avoir miné la suite de sa vie professionnelle. Jusqu’au premier John Wick réalisé en 2014.

Comme le personnage de John Wick qu’il interprète, l’acteur Keanu Reeves, « acteur canadien né à Beyrouth » (selon Wikipédia) s’y connaît bien en méthodes de survie. Ce qui est très pratique dans John Wick Parabellum où j’ai arrêté de compter à partir de la huitième scène d’action.
Dans ce troisième acte qui fait le plein en apparitions d’acteurs et en clins d’œil cinématographiques, j’ai principalement jubilé (ce seront mes seuls « spoilers ») devant la présence de l’acteur Mark Dacascos/ Zéro, plutôt perdu de vue au cinéma, depuis Crying Freeman (1995) et Le Pacte des loups (2001) de Christophe Gans. Mark Dacascos, à 55 ans, est toujours un artiste martial en forme. Mais, surtout, il apporte la plus grande partie de la touche d’humour du film, bien assisté en cela – quand ils apparaissent- par les acteurs et artistes martiaux indonésiens Cecep Arif et Yayan Ruhian que l’on a pu voir par exemple dans les The Raid 1& 2 réalisés par Gareth Evans en 2011 et 2014.

John Wick reste cet homme et ce fils déchu. Malgré tous ses efforts, selon notre regard humain, l’iniquité continue de le frapper à la façon de cette grosse boule blanche qui harcelait Numéro 6/ l’acteur Patrick MacGoohan dans la série Le Prisonnier chaque fois que celui-ci voulait s’échapper.
Moins subversif que Numéro 6, John Wick reste cet être maniéré et hébété devant l’impossibilité de sa Condition. Celles et ceux vers lesquels il se tourne afin de trouver un peu d’amour, de reconnaissance et de conseils, même s’ils le reçoivent ou l’accompagnent un moment, le maltraitent et le rejettent, toujours commandés à un moment ou à un autre par le ressentiment doublé d’une une volonté supérieure. Seule la violence meurtrière des tueurs – pour l’appât du gain ou davantage pour le prestige – se montre totalement dévouée et disponible pour l’entourer de ses bras.

Ignorant de sa propre substance ou acceptant les épreuves afin de mériter d’être accepté tel qu’il est, John Wick est en effet plutôt un jumeau du Crying Freeman incarné par Mark Dacascos. Bien plus que du personnage de Jack Reacher incarné par Tom Cruise dans le Jack Reacher de Christopher Mc Quarrie ( en 2012) et le Jack Reacher Never Go Back d’Edward Zwick ( 2016). Le Personnage de Jack Reacher contrôle toujours son destin et son immunité. Il contrôle son identité et sûrement aussi son dernier souffle. Américain jusqu’au plus haut point, Jack Reacher est cette idée qu’avec nos mains, du travail et de la volonté, on peut absolument tout faire y compris être totalement libre et vivre sans attaches. Ce qui est peut-être l’expérience que Tom Cruise a eu de sa vie jusque-là.

John Wick démontre exactement le contraire.

L’hôtel Continental géré par Winston est situé à New-York, ville-symbole de la réussite américaine. Pourtant aucun policier ne fait surface dans un des trois épisodes de John Wick. Le message est que le crime organisé dirige le monde. Que notre monde est l’hôtel – de Luxe- de l’enfer. Et que l’enfer lui-même réclame des règles et leur application afin de persister. Sauf qu’en dehors de John Wick qui se bat pour une vie paisible avec son chien et la mémoire de sa femme disparue, on se demande de quoi est véritablement faite la vie de tous ces hommes et ces femmes (Winston inclus) qui dirigent le monde si ce n’est de Devoirs et de règles.
A partir de là, avoir un chien attachant et fidèle a énormément de valeur. Et, il faudra en outre s’en contenter car c’est dans cette relation avec son chien que tiennent les principales scènes d’affection désintéressées du film. Et John Wick, « l’underdog », est aussi ce chien, cet outsider et ce galopin auquel on s’attache et auquel, s’attachent, sous un sadisme latent, certains personnages qui sont peut-être des adultes ayant définitivement perdu leur combat pour garder leur enfance ainsi que l’innocence qu’elle est supposée comporter.


Pour son côté jeune chiot étonné qui continue de croire en son idéal de vie, John Wick, malgré les cocktails d’agressions qui lui sont servis, est un héros plus « résilient » et plus « positif » – christique, on est obligé de le dire- que le personnage d’Alejandro joué par l’acteur Benicio Del Toro dans Sicario réalisé par Denis Villeneuve (2015) et dans le Sicario La guerre des cartels réalisé par Stefano Sollima en 2018. Le personnage d’Alejandro, plus prédateur que proie, a une aura souvent plus inquiétante (une des caractéristiques du jeu d’acteur de Benicio Del Toro qui sera peut-être surnommé un jour Benicio Del Torah) que le mal qu’il déterre.

Mais John Wick est aussi plus imperméable au remords qu’un Denzel Washington dans le Man on Fire de Tony Scott (2004). Le gentil chien-chien bien dressé et bien propre de John Wick est peut-être son image la plus fréquentable sur Terre. Une des laisses qui le retiendrait de montrer son vrai visage à l’instar d’un Hellboy si celui-ci décidait de réduire son humanité dans la benne à ordures. D’autant que contrairement au Tom Stall/ l’acteur Viggo Mortensen du A History of violence réalisé en 2005 par David Cronenberg, John Wick a assez vite échoué à protéger sa vie de famille.

Le gentil chien-chien pourrait être un des derniers espoirs ou le testament de John Wick. Coté pile, le chien de « John »/ Jardani serait une sorte de cousin éloigné du chien de Dogville de Lars Von Trier (2003). Celui qu’il faut sauver car il permet à John Wick de conserver encore cette apparence qui, malgré le Luxe, les trahisons, les meurtres et les sévices, lui permet encore de nous ressembler. Côté face, il pourrait être le testament de John Wick car son histoire est peut-être déjà terminée et ces films pourraient être ce qu’il reste de son visage d’humain et d’orphelin.

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