Dans le monde du Rap français, Rim’K est un véritable monument. Sa carrière commence au sein du 113 Clan avec APE et Mokobe. Avec leur album “Prince de La Ville” sorti en 2000, le groupe membre de la Mafia K1 Fry réussit à enfoncer les portes du succès. Avec des titres comme “Hold Up” en featuring avec Demon One d’Intouchable, “Tonton du Bled” ou encore le titre éponyme de l’album, les rappeurs du 94 réussissent à l’instar de certains rappeurs français comme Passi avec “Les Tentations” à rendre le Rap audible pour une partie du public qui le boude généralement. Les refrains de “Tonton du Bled” ou “Jackpot 2000” deviennent l’hymne de la génération 90′, et sont le point de départ d’un mouvement qui fera du Rap la musique la plus écoutée en France. C’est pour toutes ses raisons que Rim’K est un véritable fondateur.
Puis les années s’écoulent lentement, la fin des 90′ et le début des 2000′ qui avaient consacré un rap français plus censé et moins bling-bling que son ancêtre américain, laissent place aux années 00′, et au rapprochement des genres. Pendant près de 10 ans, le rap français se conforme à son paternel américain, les clips mettent en avant l’argent, les voitures, les belles femmes, et tous les signes extérieurs de richesse. Cette rébellion n’est pas vaine. Le mouvement hip-hop dans son ensemble vient d’en bas. Lorsqu’il montre où il est arrivé c’est déjà une révolte totale contre cette société dans laquelle les quartiers sont méprisés. Au départ c’est Rohff et Booba qui se partagent l’ensemble du gâteau. Leur image, leur manière de communiquer prend le pas sur leur musique surtout lorsque Internet et les réseaux sociaux se généralisent à la fin des 00′ sous l’effet de la démocratisation du haut débit.
Avec Booba, le lien avec les Etats Unis devient très fort. Car le rappeur français a l’habitude d’anticiper les tendances françaises en allant chercher du côté des USA. Son album “0.9” à ce titre est révélateur. C’est la première fois qu’un rappeur français utilise le vocoder à ce point. Tout le monde le critiquera, puis quelques années plus tard tout le monde le suivra. Ce n’est qu’au milieu des années 10′, que le Rap se diversifie et que les éléphants du Rap français lâchent un peu leur monopole en faveur de quelques rookies ou quelques oubliés très créatifs. C’est au milieu des années 00′ que Rim’K renaît. Il choisit ce moment idéal pour renaître de ses cendres.
A la différence de Kool Shen et son retour honorable mais manqué avec “Crise de Conscience”, de Joey Star et son album trop conceptuel avec Natty sur “Carribean Dandee”, le leader du 113 Clan a compris que le monde de la musique a évolué sans les fondateurs. Aujourd’hui à part quelques renégats qui continuent à faire de la boom bap, les tendances sont Trap, Cloud, Club, et les sons old school ou réputés comme tels suivent de très ou de loin la base de ces tendances. Jusqu’à son dernier chef d’oeuvre, sa véritable renaissance Rim’K sort 3 albums depuis 2010 dont la fameuse “Monster Tape” et “Fantôme“. Cependant alors que les chiffres de “Mutant” viennent tout juste de tomber et qu’il consacre le retour en force du quarantenaire avec 11 000 ventes en premières semaine, il fait aucun doute que Rim’K est le dernier des fondateurs des 90′ à avoir réussi ce coup de force.
Sur la pochette de “Mutant” réalisé par Fifou, Rim’k pose devant un monde en ruine. Et effectivement entre Trap, Cloud, il continue de déverser quelques vers censés et engagé comme dans “Bonhomme de Neige” ou encore dans “Immigri”. Le rappeur ne se contente de punchliné en égotrip tout au long des 16 titres qui composent ce terrible album. Le pessimisme domine désormais le Rap français avec des leader comme Dems ou encore les grands de PNL. Au niveau des featuring aussi, le rappeur du 94 est à jour. Entre son tube “Air Max” avec Ninho avec lequel il lance les hostilités (c’est le premier extrait de son album), et ses featuring avec Alonzo et Vald, c’est toute la crème du Rap français qui s’est donné rendez vous sur l’album de Rim’K. Après les rivalités des années 00′, le rap français se retrouve sous les hospices du fondateur. Avec “Carmen” et “911″, l’artiste du 113 testent respectivement le son love et un son un peu reggaeton. Il ne fait aucun doute que “Mutant” est la bonne surprise de ce début d’années. C’est un album complet qui vient parachever la carrière exceptionnelle du fondateur que l’on a peut être enterré trop vite.