Saturday, December 21, 2024

“Rappeurs souffrants de troubles psychiques : lorsque folie et génie se confondent…”

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Sur notre planète bleue : une personne sur quatre souffre de troubles psychiques caractérisés… Parmi ces gens, les artistes ne sont évidemment pas exclus. Ils sont même très souvent, dans leur nature, enclins à en souffrir… Du rappeur Cage à Despo Rutti, en passant par Eminem, Ill Bill, Vinnie Paz ou encore Kanye West, force est de constater que certains des plus grands rappeurs sont généralement aussi les plus atteints… Puisent-ils la source de leur création dans leur dite « folie » ? Nous allons analyser le parcours de ces différents rappeurs pour le moins atypiques…

Cage est né dans l’ouest de l’Allemagne, de parents américains, en 1973. Son père faisait partie de la police militaire, jusqu’à ce qu’il se fasse virer pour avoir vendu et consommer de l’héroïne dans la base… La famille déménage à Middletown à New York. Cage n’est alors qu’un enfant… Son père, abusif et toxicomane, force régulièrement Cage à lui mettre le garrot autour du bras afin qu’il puisse se shooter à l’héro, en plus de le frapper et de l’humilier constamment… Alors que Cage n’a que huit ans, son père est arrêté pour avoir menacé sa famille (Cage et sa mère) avec un fusil à pompe. Plus tard, lorsque le rappeur est adolescent, au lycée , sa mère s’est remariée deux fois. Et il subit très souvent les coups de son second beau-père Frank. Cage commence alors à prendre différentes drogues, comme le PCP, la cocaïne, le cannabis et consomme beaucoup d’alcool… Il est alors envoyé par son oncle dans une base militaire allemande, où il se fait également tabasser par ses « camarades militaires ». Il est renvoyé au domicile familial à New York un an plus tard. A 16 ans Cage est arrêté pour s’être battu dans les rues de New York et pour possession de différentes drogues à maintes reprises. Sa mère parvient à convaincre le juge qu’il souffre de graves troubles mentaux. Il est donc envoyé à l’hôpital psychiatrique Stony Lodge pour un examen psychiatrique de deux semaines… Il y reste seize mois… Cage fit alors partie d’un groupe sur lequel on testait la fluoxetine, une molécule présente notamment dans le Prozac. Après avoir suivi ce traitement, il devint suicidaire et tenta à différentes reprises de se pendre avec ses lacets ou bien de garder secrètement ses doses de lithium journalières; cachant le tout pendant un mois, puis avalant l’intégralité des doses cachées d’une traite… Il est alors diagnostiqué « maniaco-dépressif », aujourd’hui communément appelé «bipolaire » ou « obsessionnel angoissé »… Cage sortit par la suite de l’hôpital Stony Lodge à l’âge de dix huit ans, et débuta sa carrière de rappeur… Cité par la suite comme une référence par des artistes tels que Eminem ou Marilyn Manson (avec qui il partagea la scène à plusieurs reprises), Cage revient de loin mais a su s’imposer comme une figure emblématique du Hip Hop dit « Underground », ce qui n’était pas gagné aux vues de ses antécédents…

En France, nous avons également le cas de Despo Rutti qui souffre de crises de paranoïa et de délires mystiques, produits de bouffées délirantes aigues, mais qui n’en demeure pas moins un rappeur de génie. Despo fut hospitalisé à plusieurs reprises, souvent à sa demande, mais une fois pour avoir planté au couteau l’une de ses ex-concubines pour suspicions d’adultères en pleine crise psychotique aigüe… Le rappeur traite de l’univers psychiatrique dans grand nombre de ses morceaux, notamment dans les titres « J’aime ma psychiatre comme un fou », ou encore « Risperdal »… Il faut dire que Despo en connait un rayon… Le rappeur et auteur, né en 1982 à Kinshasa, est élevé par ses tantes et ses oncles maternels, en raison d’un père absent depuis la naissance, et d’une mère occupée, tenancière d’une maison close. De ce fait, il est très vite envahi voir harcelé par la violence du monde adulte. Très tôt, Despo perd ses illusions et développe une rage intérieure ainsi qu’un sentiment d’incompréhension face à cette violence. Le jeune Despo est d’ores et déjà un écorché vif… Malgré ces difficultés, le futur rappeur finit par s’envoler en France alors qu’il n’a que 10 ans; commence à écrire ses premiers textes plus tard; encouragé par deux de ses amis MC’s, et devint par la suite une référence incontournable du rap hardcore, subversif et engagé, avant de s’orienter vers la spiritualité, notamment par le biais du judaïsme…

Parmi les superstars atteintes de maladies mentales, nous pouvons notamment mentionner le proclamé « Rap God » Eminem. En effet, ce dernier, a longtemps souffert de troubles du comportement violent ainsi que d’alcoolisme et de polytoxicomanie (notamment aux opioïdes et à la benzodiazépine). Il fut reconnu par le gouvernent américain comme « mentally unstable » (instable mentalement, donc), et du longuement se battre avec ses démons avant de définitivement arrêter toutes consommations de toxiques en 2006. La violence conjugale qu’ a subi son ex femme Kim, le fait que sa fille l’ait retrouvé un jour convulsant sur le sol après une overdose d’anxiolitiques mélangé à une forte prise d’alcool, l’ont poussé à aller se faire soigner en « rehab »… Il y resta un long moment et fréquenta les narcotiques anonymes durant plusieurs années… Beaucoup soupçonnent également le rappeur d’être sous traitement anti-psychotique, tant le comportement d’Eminem est étrange. En effet, le bruit court que Slim Shady n’est pas quelqu’un de très sociable. Il aime resté enfermer chez lui des jours entiers à enchainer les séances d’écritures jusqu’à l’épuisement intellectuel. S’entrainer à rapper le plus longtemps et le plus vite possible jusqu’à trouver les rimes et l’interprétation parfaite. « Fou » ou bien génie, peu importe, le rappeur a plus de onze ans de sobriété. Il est considéré par des millions de personnes comme le meilleur rappeur de tous les temps et demeure une icône culturelle incontournable. Si bien que le mot « Stan » (terme qu’il a inventé pour désigné un fan obsessionnel et excessif) est entré dans le dictionnaire . Tout le monde ou presque reconnait le génie d’Eminem aujourd’hui…

Les cas de Vinnie Paz ou Ill Bill sont un peu particuliers. En effet, Vinnie, originaire de Philadelphie, est diagnostiqué bipolaire lors de la mort prématurée de son père, qui insuffla en lui un profond traumatisme… Il se mit à consommer de l’herbe, de l’alcool (en très grandes quantités) dès ses treize ans. Dans le morceau “Warmonger” sorti en 2010, le rappeur, reconnaissable par sa voix grave enragée et son flow incisif, rappe « Don’t even fuck around son is a goon, son is bipolar alcoholic son is consumed », traduisible par « Ne blague même pas avec moi le mec est félé, le mec est bipolaire, alcoolique, le mec est cramé… » ou encore dans le morceau Cheesesteaks, paru en 2012 : « I’m a manic-depressive never get excited at all » : « Je suis un maniaco-dépressif, je ne suis jamais excité du tout »… La phrase semble étonnante lorsque l’on sait que les personnes bipolaires sont généralement sujettes à beaucoup d’excitations lors des phases d’hypomanies ou de manies… Mais le constat est établi.

Vinnie ne se cache pas de sa maladie et de ses addictions… Il est également un grand paranoïaque, adeptes de différentes théories du complot, notamment celles de présences extra-terrestres, des reptiliens, ou encore lorsque le rappeur affirme que George Bush est le petit fils de l’occultiste sataniste Aleister Crowley ou encore que les « illuminatis» sont responsables de la mort de Michael Jackson… Le rappeur Ill Bill souffre de problèmes très similaires, de nature complotiste et souffrant de paranoïa, si bien que les deux MC’s américains ont sortis deux albums en duo sous le nom de groupe « Heavy Metal Kings », où violence et théories du complot sont omniprésents.. Dans le morceau « I’m from Brooklyn » : Ill Bill rappe « I’m fucked up, I need lithium »/« J’suis un baisé, j’ai besoin de lithium ».

Le lithium étant ce que l’on donne généralement aux personnes souffrants de troubles bipolaires… Bill rappe également dans un de ses titres que le Sida a été créé dans un laboratoire par des scientifiques en 1975, dans le but de détruire le peuple africain…

Leur déboires n’empêchent pas les deux rappeurs d’être considérés comme des pionniers et des légendes du hip hop une nouvelle fois dit « underground », même si l’étendu de leur fan base dépasse cet adjectif quelque peu réducteur. Des références à Charles Manson, Anton LaVey ou Richard Ramirez sont très présentes dans leurs oeuvres; les deux rappeurs étant particulièrement fascinés par le macabre, les tueurs en série et l’obscurantisme…

Kanye West, qu’il est inutile de présenter, quant à lui, est actuellement sous traitement médical après avoir été récemment diagnostiqué bipolaire et mégalomane. Il est resté quelques jours aux urgences psychiatriques de Los Angeles après une crise mystique suivie d’un délire paranoïaque en plein concert, où il s’en est pris à son ancien ami et collaborateur Jay-Z, l’accusant de vouloir sa mort et le suppliant de ne pas envoyer des gens l’assassiner… Il se disait également investi d’une « mission spirituelle importante»… Suite à cela, West entama une démarche de soin et retrouva peu à peu sa lucidité. Il a nommé l’un de ses albums « I Hate being bipolar, it’s awesome »/« Je déteste être bipolaire : c’est génial », inspirant des milliers de ses fans bipolaires à retrouver confiance en eux et ne pas avoir honte de leur pathologie… «It’s a super power »/« C’est un super pouvoir » déclarait l’artiste dans un de ses titres…

Lorsque nous analysons les dires et le parcours de ces rappeurs pour le moins atypiques, il semblerait qu’ils puisent leur source de créativité dans leur folie, et inversement… Ces artistes aux parcours difficiles et non conventionnels ayant par la suite développés quelques « fragilités » sur le plan psychiques, n’en demeurent pas moins des artistes incontournables… Ils démontrent par leur oeuvres respectives que folie et génie vont généralement de paire…

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